Aujourd’hui, je vous propose de méditer sur une drôle de phrase.
Cette citation, Pascal Pillard l’a offerte, presque comme une confidence, en clôture de notre dernière vidéo, parue mercredi.
L’artiste en transition
Et si elle résumait parfaitement ce que traverse un artiste en transition ?
C’est peut-être votre cas actuellement.
En effet, il y a des période où l’on s’éloigne de la nécessité de “produire” ou “réussir” une œuvre.
On ressent alors le besoin de se réaccorder avec quelque chose de plus essentiel.
À ce moment, l’enjeu consiste souvent à retrouver un plaisir perdu ou à faire surgir un sens nouveau 🌱
On se sent usé, et pour cause:
On croit souvent que le dessin est un moyen de restituer le réel, de le figer pour en proposer une version maîtrisée.
Mais le problème avec cette vision, c’est qu’elle tourne court.
Car elle envisage le dessin, soit comme un substitut de la réalité, soit comme une pure invention.
Dans un cas vous êtes un exécutant servile, dans l’autre, un despote en son royaume.
Bienvenue au coeur de l’éternel combat qui oppose la légitimité et l’expression 🤯
Si vous balancez, vous risquez d’y perdre des plumes…
Heureusement il y a une autre voie possible.
Elle se situe entre les deux et se joue dans l’instant présent.
Dessiner et peindre : c’est maintenant
Souvenez-vous lorsque vous étiez enfant… lorsque dessiner n’avait d’autre enjeu que celui d’être en train de le faire.
Rappelez-vous ce plaisir que vous éprouviez, qui résidait plus dans la qualité du moment que dans le résultat obtenu.
Vous étiez à ce que vous faisiez.
C’est ça dessiner. S’engouffrer dans un espace-temps qui jette un pont entre soi-même et le monde, comme une interface qui rend la perception plus riche, plus lente et plus incarnée que celle du seul regard.
Car le dessin est une expérience qui épouse le temps, engage tout votre corps en convoquant les cinq sens ✋
Si vous savez vous montrez attentif, un monde possible s’ouvre.
C’est un espace sensible qu’on pourrait justement appeler l’irréel.
Un espace sensible d’entre-deux
Une fois que vous vous installez dans cet « entre-deux », les attentes deviennent caduques et ce ne sont plus les moyens qui fixent vos limites.
Il échappe au discours et vous donne accès au dessin.
Alors vous pouvez librement “tester le matériel”.
Je ne parle pas d’expérimenter un nouveau produit ou une nouvelle technique.
Je parle du vrai matériel. Celui qui résiste, celui qui glisse, qui gratte ou qui frotte… Il est sensation.
S’il fait souvent râler le dessinateur, dites-vous que c’est par lui que vous instaurez le contact le plus intime avec l’acte de dessiner.
Le matériel vérifie que vous êtes présent, il exige même que vous écoutiez.
Alors soyez disponible et attentif !
Car le dessin, c’est un espace fictif dans lequel vous êtes en prise avec la réalité.
C’est précisément la zone rejointe par Pascal Pillard.
Car il ne change pas seulement de style. Il change de posture.
Quand l’artiste change de posture
Il abandonne le besoin de prouver pour entrer dans une relation plus directe, plus physique, plus intuitive.
Pour ce faire, il dépouille son expression et la réduit à ses composantes les plus prosaïques: Medium / Support / Geste.
Il voit. Il touche. Il écoute. Il sent. Il goûte.
Il se laisse surprendre et accepte de ne pas tout contrôler. Il se met à disposition du réel en écoutant ses sensations.
Et c’est peut-être ça, finalement, « aller vers l’irréel pour tester le matériel ».
Vous devriez essayer 😉
En attendant, vous pouvez retrouver Pascal dans son atelier, au moment précis où son travail bascule.
Il nous livre un témoignage rare, brut, sensible 👇
C‘est tout pour cette édition,
J’espère que cette vidéo vous donnera envie d’occuper le dessin comme un poste avancé depuis lequel approcher le réel avec l’acuité d’un môme.
N’hésitez pas à m’écrire pour me raconter vos révolutions, petites ou grandes 😉
Je vous donne rendez-vous pour la 64ème édition de La Bobine !
PS: Pascal est un vieil ami avec lequel nous avons usé les disques d’Alain Bashung 😉
Mais cette complicité de 30 ans a vu le jour dans des ateliers ou nous fourbissions nos armes.
Vous aussi, vous pouvez rejoindre une communauté de dessinateurs avec lesquels échanger et progresser.
C’est un soutien formidable !