Que s’est-il passé vendredi dernier?
Vous vous êtes peut-être aperçu que j’ai manqué notre rendez-vous hebdomadaire.
Pas de newsletter…
Pourtant, je tiens à ce rituel qui rythme mes semaines et me donne tant de grain à moudre.
Alors quoi?
Figurez-vous que j’étais à Bruxelles!
Je suis allé rendre visite à mon ami, le peintre Yves Gobart, à l’occasion d’une exposition dans laquelle il présente une partie de son travail.
Comme elle se termine cette semaine, je ne voulais manquer l’occasion.
Mais ce n’est pas la seule raison de mon empressement.
Lisez bien le sous-titre de l’exposition…
Vous avez compris: j’ai fait une entorse à mon propre rituel pour aller m’enquérir du sien.
Le sujet de cette exposition est tellement intéressant que je me suis dit qu’il fallait qu’on en parle.
Mais de quoi ça parle, au juste ?
Les artistes sont comme vous, ils se posent une foule de questions, mais au lieu de se torturer l’esprit, ils font cette chose que vous devriez peut-être faire, vous aussi:
Ils ritualisent leur pratique.
Je vous rassure tout de suite:
ici, pas de rituel mystique, ni aucun rapport avec d’obscures superstitions.
Il s’agit simplement des habitudes, des protocoles, des routines sur lesquelles les artistes basent leur travail.
Mais pourquoi font-ils cela ?
Parce que, répéter des actions simples aux conséquences prévisibles, c’est la meilleure façon de développer et d’affiner ses compétences.
Sans le cadre d'une routine, la recherche n'est qu'une errance incertaine.
Le problème lorsque l’on apprend à dessiner, c’est qu’on adopte souvent l’attitude inverse.
Comme on cherche à changer sa manière de faire pour obtenir des résultats, on dépense beaucoup d’énergie pour faire autrement.
Et quand ça ne bouge pas, on s’impatiente.
Alors, et sans qu’on s’en rendre compte, on se soumet au changement permanent.
Non seulement c’est très inconfortable mais ça ne fonctionne pas.
Pour progresser, vous auriez intérêt à vous appuyer sur une routine patiente plutôt que de vous infliger des pics d’efforts intenses.
Contrairement à ce qu’on pourrait penser, la routine ce n’est pas l’ennui.
C’est un décollage progressif.
Voici les 4 avantages que vous pouvez en tirer pour votre pratique du dessin.
1- Répétition et consistance
Il y a une différence entre la compréhension intellectuelle et l’intégration intime d’une compétence.
Autrement dit: comprendre comment dessiner n’est pas savoir dessiner.
La maîtrise s‘obtient par répétition, jusqu’à assimilation.
Dites-vous que la régularité prime sur l’effort.
Parce que dans votre cerveau, chaque action laisse une trace neuronale qui se renforce à mesure que vous la réactivez.
Elle se mue en habitude.
C’est un peu comme les chemins de désir que l’on rencontre dans l’espace public et qui se matérialisent à force de passages successifs.
On finit par les emprunter sans y penser.
De la même manière, c’est en vous adonnant à une routine bien réglée que vous maximisez vos chances de consolider les apprentissages.
Mais ça ne s’arrête pas là.
Car, en intégrant pleinement une compétence, vous diminuez considérablement la charge mentale dédiée à son exécution.
Alors, vous êtes en mesure d’allouer cette énergie disponible à la résolution de nouveaux problèmes, ouvrant la voie à des pistes de progression.
2- Amélioration de la concentration
Récemment, alors que nous incitions nos élèves à se questionner sur la nature de leur protocole de dessinateur, Colette nous a confié ce témoignage:
C’est un exemple qui décrit avec humour ce qu’on appelle la procrastination active.
Il y a toujours mieux ou plus urgent à faire…
C’est vrai qu’on n‘échappe pas si facilement aux distractions.
Faire barrière aux sollicitations diverses, c’est le rôle de la routine.
Elle fonctionne comme un refuge.
Et, plus votre protocole est intentionnel, plus vous optimisez votre énergie mentale.
Car, dans ce cadre défini par vous, c’est vous qui instaurez la règle du jeu et c’est vous dictez le temps.
Alors n’hésitez pas à vous fixer des rendez-vous très précis et engagez-vous à n’en manquer aucun.
Au même titre que vous vous brossez les dents tous les jours dites vous qu’il n’y aura, par exemple, plus de jeudi sans la séance de dessin que vous avez programmé, à l’heure dite.
Vous apprendrez ainsi à dire non aux sollicitations qui entrent en contradiction avec ce contrat.
“J’peux pas, j’ai piscine.”
Vous verrez, c’est plus facile à faire respecter quand c’est ritualisé.
3- Réduction du stress
La procrastination trouve souvent son origine dans la peur et c’est parce qu’on réfléchit trop qu’on finit par inventer des solutions d’évitement.
Mais si vous avez un espace réservé dans votre calendrier, vous réduisez drastiquement les tensions générées par l’incertitude.
- Rien de plus stressant que de se mettre à dessiner quand ce n’est pas le moment.
- Rien de plus culpabilisant que de savoir que vous ne faites pas tout ce qu’il faudrait pour avancer.
- Rien de pire que de s’interrompre au beau milieu d’un dessin, sans savoir quand on aura l’occasion de s’y replonger.
- Rien de plus décourageant que de s’y remettre après un long arrêt en ayant l’impression qu’il faut tout recommencer.
Alors remplacez l’incertitude par l’habitude.
Car la routine vous place dans une situation prévisible qui calme vos inquiétudes.
Et la répétition vous donne des perspectives de résolution à venir.
Ainsi, vous ne craignez plus le couperet à la fin de chaque séance de travail.
Dites-vous que vous n’avez pas obligation de résultat, vous n’avez qu’une obligation de moyens.
La pratique artistique se nourrit de temps et les artistes cadrent leur temps pour ne pas le perdre.
Mais ce rituel, cette routine ou cette habitude – appelez ça comme vous voudrez – loin d’étouffer leur créativité, constitue la base sur laquelle elle peut s’épanouir en toute confiance.
C’est sur cet aspect de son travail que je suis allé interroger mon ami Yves, à Bruxelles.
Il en résulte un échange très riche.
Plus de 2 heures d’entretien filmé que j’ai mis sur la table de montage pour en tirer la substantifique moelle.
À venir prochainement sur notre chaîne Youtube…
J’ai hâte de vous partager cela!
En attendant, je suis content de reprendre la routine de cette lettre hebdomadaire qui, je l’espère, a su se faire une place dans vos habitudes de lecture.
C’est tout pour cette semaine,
N’hésitez pas à me faire part des routines de travail que vous pratiquez déjà où, comme Colette, des sirènes qui vous appellent à d’autres tâches…
Nous essayons, semaine après semaine, de rendre votre chemin plus facile 🌈
À la semaine prochaine !
Laurent