Une méthode de dessin suédoise vient de changer la donne avec des modèles de proportions prêts à l’emploi pour ne plus jamais rater un dessin !
Le IKEA du dessin est enfin arrivé.
Avec GRÜNWØLDT l’artiste suit désormais un plan d’exécution, étape par étape, pour réaliser un dessin prêt à accrocher au mur… l’encadrement est livré avec la méthode.
Soyons sérieux deux minutes, une telle méthode n’existe pas encore et c’est tant mieux. Car, entre nous, qui voudrait d’un dessin standardisé qui relègue l’artiste au statut d’exécutant docile ?
Et pourtant GRÜNWØLDT n’est pas si éloignée de certaines propositions, bien réelles celles-ci.
les modèles de proportions vendent du rêve
Elles ne sont pas toutes aussi mauvaises mais leur application est souvent problématique car il y a un fossé entre la théorie et la réalité qui se présente au dessinateur.
Ainsi, au cours de notre dernier live, une de nos élèves s’inquiétait de ce que son observation s’accordait mal avec les préconisations d’Andrew Loomis, illustrateur américain rendu célèbre pour sa méthode de dessin.
Effectivement, si on suit ses instructions, dessiner un portrait c’est d’abord une histoire de mesures.
Très bien, mais la réalité est susceptible de vous proposer tout autre chose!
Du coup, il faut qu’on en parle.
Méfiez-vous des modèles de proportions 😱
L’idée ici n’est pas de les bannir, car leur utilité est prouvée. En revanche, c’est leur emploi qui pose problème.
Mais au fait, pourquoi avez-vous recours à des modèles de proportions ?
Vous ne voulez pas faire n’importe quoi alors, quitte à vous y mettre, autant réaliser un dessin qui soit bien fichu et qui corresponde à peu près à l’idée que vous vous en faites.
Alors, pour optimiser les chances de succès, vous prenez des repères auprès de ceux qui savent, à priori, comment faire.
Bonne idée, mais certains modèles peuvent s’avérer moins aidant que vous ne le pensiez.
1 | Les modèles de proportions techniques:
Il sont généralement bien fichus, car ils découlent d’un raisonnement et d’un développement logiques qui font le récit d’un monde parfait.
Car, pour extraire des modèles utiles, le théoricien est obligé d’exposer des généralités.
Le problème c’est que la réalité se présente toujours de manière singulière.
Donc, tout comme la carte ne correspond pas au territoire, la notice de montage modélisée se ne se superpose pas à votre situation particulière.
Aussi il arrive souvent que l’application scrupuleuse d’une méthode vous conduise dans une impasse, vous éloignant ainsi de ce qu’elle veut vous monter.
C’est toute la différence entre la théorie et la pratique.
2 | Les modèles culturels:
Ils sont aussi rudement bien fichus, et pour cause: ce sont des oeuvres que vous considérez comme exemplaires ou bien que l’autorité vous présente comme telles.
Ces objets fondent votre conception du “beau dessin” et cristallisent une image du projet que vous visez.
Mais cette image est imprécise car le mélange de ces références ne forme qu’une idée brumeuse du “beau dessin”.
Donc, si vous empoignez un de ces modèles en guise de point de départ, vous n’êtes guère avancé.
C’est pas grave, direz-vous, il suffit d’associer le modèle technique et le modèle culturel pour reconstituer le parcours complet 😁
Voilà qui semble frappé au coin du bon sens, sauf ce n’est pas comme ça que ça se passe.
Parce que ces deux modèles ne s’entendent pas très bien.
Incompatibles 💧🔥
La poursuite d’une méthode préconçue et le développement d’une idée sont deux dynamiques de développement du dessin contraires.
Car, non seulement elles ont des sources différentes mais elles empruntent des trajectoires inversées.
La méthode part d’un principe qu’elle développe jusqu’à sa résolution de sorte qu’elle ne réalise rien d’autre que ce qui est prévu.
L’idée part d’elle même et cherche à rebours, en prenant de multiples détours, le chemin qui mène à sa réalisation.
Il y a peu de chance que ces deux trajectoires se nouent et il faudra l’intervention d’un troisième agent pour les faire collaborer efficacement.
Il s’agit d’un troisième modèle, mais il est de nature différente car il s’agit DU MODÈLE, celui que vous avez devant les yeux 👀
Après tout, à qui d’autre se fier au moment où le réel est sensé accaparer toute votre attention?
C’est l’observation qui vous enracine dans le présent du dessin, c’est le seul point de départ qui vaille !
L’observation en tête 👓
La vérité c’est que vous êtes tellement soucieux du résultat que vous perdez de l’acuité. Vous voyez confusément.
Pourtant, quand vous dessinez, le premier personnage à entrer en scène c’est bien l’observateur et c’est à partir de lui que tout se déclenche.
Alors pourquoi mettre en avant l’exécutant ou le critique ?
Patience, leur temps viendra.
En attendant, vous devriez utiliser le dessin comme un outil de découverte.
Répondez présent au rendez-vous qu‘il fixe avec le monde réel car, ce ne sont ni le respect des règles, ni la soumission à des modèles qui vous dévoileront les mystères du dessin.
C’est votre capacité à observer et à interpréter ce que vous voyez qui forge votre pratique et votre identité.
Cultivez-la soigneusement car vos idées les plus sincères naissent de la qualité de votre attention et c’est en développant votre point de vue unique que vous faites jaillir une source inépuisable d’inspiration et d’invention.
Autour du regard tout reprend sa place:
La méthode vient soutenir l’observation et permet de lire le réel pour faire émerger l’idée. À son tour l’idée est étayée par la technique, elle même validée par le regard.
3️⃣ actions pour restaurer l’observation
- Laissez-vous inspirez: au lieu de vous lancer tête baissée dans votre dessin, levez le nez et prenez le temps du regard. Voyez ce qui retient votre attention. Surtout soyez patient et laissez monter votre émotion. C’est elle qui vous met en mouvement (voir racine latine). Peu à peu, vous développerez une curiosité naturelle qui enrichira votre pratique et votre créativité.
- Soyez sélectif: au lieu de reproduire fidèlement votre modèle, choisissez un aspect spécifique et empoignez-le, à l’exclusion de tout autre. Demandez-vous quels moyens vous pouvez déployer pour que le dessin révèle ce qui a particulièrement stimulé votre attention. Dites vous que l’objet de votre dessin n’est pas le modèle mais l’aspect sous lequel vous aurez su le monter. En réduisant le champ des possible vous simplifierez l’exécution et vous demeurez disponible à l’observation sincère de votre sujet.
- Inversez le processus technique: Laissez l’observation vous guider dans le choix de la technique à employer et choisissez celle qui sera la plus adaptée pour traduire votre vision. Ne dites plus ”je vais faire un dessin à la plume, je vais faire un dessin au fusain” mais demandez-vous quelle technique sera la plus adaptée à votre situation. C’est ainsi que votre exécution sera la plus fluide.
Restez à la proue 🏴☠️
Le problème avec les méthodes appliquées trop strictement ou les modèles préconçus c’est qu’ils vous placent dans un rôle de suiveur. Vous êtes toujours à la traine.
Aussi, je vous conseille de prendre l’initiative. Soyez explorateur !
Multipliez les expériences, car il est préférable de dessiner souvent en changeant régulièrement de perspective plutôt que de passer des heures sur un seul dessin parfait.
La semaine passée je vous parlais d’Emmanuel Guibert.
Son dernier livre « La mer à la campagne » est un recueil de croquis qui illustre cet état d’esprit animé par la curiosité.
Dites-vous que chaque croquis est une opportunité d’apprentissage.
Bien sûr, certaines de vos découvertes viendront confirmer ce que la technique vous enseigne, mais soyez certain que vous tomberez aussi sur l’exception qui confirme la règle.
C’est tant mieux car c’est à chaque fois l’occasion de prendre un peu d’expérience.
Quand ça arrive, ne vous préoccupez pas de tout remettre dans l’ordre mais, au contraire, ajoutez ces découvertes à votre arsenal et utilisez-les. Vérifiez leur validité et conservez ce qui est bon, peu importe d’où ça sort.
N’oubliez pas que c’est seulement pour éclairer votre chemin que les modèles présentent une version du monde apparemment cohérente. C’est très utile, à condition de garder un peu de recul.
Car le monde est livré sans notice de montage, et votre point de vue est unique.
Tant pis pour la méthode GRÜNWØLDT…
C’est tout pour cette semaine,
J’espère que cette lecture vous donnera le goût de dessiner le nez au vent et les yeux grand ouverts 😊
N’hésitez pas à me faire part de vos réflexions car c’est à partir d’elles que nous apprenons à mieux vous connaître et donc à mieux vous aider.
👋 À la semaine prochaine !
PS: en attendant la méthode GRÜNWØLDT, nous avons la nôtre et, si elle ne fait pas de miracles, elle éclaire déjà le chemin de centaines de dessinateurs heureux 😁
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