Dessiner avec l’oeil ET la main : comment coordonner les deux

dessiner oeil et main

Cet article Dessiner avec l’oeil et la main est extrait d’un des rdv LIVE de notre communauté.

Retrouvez ce contenu en vidéo ci-dessous ou en version texte plus bas ! 

NB : au début de ce live nous avons fait une petite expérience graphique. Une de nos membres décrivait une image aux autres dessinateurs de la communauté de manière à ce qu’ils puissent la dessiner

observer et tracer : les deux actions simultanées du dessinateur

Le dessinateur est double : il est à la fois observateur et traceur. 

Ce duo-là, chaque fois que vous dessinez, vous le campez.

Quand vous dessinez, vous n’êtes donc jamais seul, vous êtes deux.

Ce sont donc deux opérations conjointes et simultanées que vous réalisez. C’est-à-dire qu’il y a une partie de vous qui est occupée à décrypter ce que vous voyez, tandis que l’autre est occupée à dessiner.

Ce dédoublement de fonctions peut engendrer certains conflits.

dessiner oeil et main

L'oeil et la main en conflit dans le dessin

Un regard trop détaillé qui empêche l'action

 On peut avoir un regard trop détaillé,  c’est-à-dire qu’on va voir tellement de choses dans son sujet que cela va paralyser l’action.

La main ne peut plus travailler, elle ne suit pas. Carle regard travaille trop, voit trop de choses, nourrit trop d’informations, de sorte qu’on ne peut plus avancer. 

Une main qui ne prend pas le temps d'observer

Parfois c’est l’action qui ne va pas écouter le regard. C’est-à-dire qu’à un moment donné, une fois qu’on voit à peu près où on veut aller, on est préoccupé par l’idée de réaliser un dessin.

Le dessin se met à galoper !
Des informations passent à la trappe.

Un manque de coordination

Si ces deux partenaires-là, l’œil et la main, ne sont pas coordonnés, la difficulté s’accumule.

Des informations essentielles se perdent dans trop de détails ou bien arrivent dans le mauvais ordre.

Les ajustements sont rop fréquents et  nuisent à la tenue de l’ensemble.

Ça arrive tellement souvent ! 
On a installé son dessin et puis d’un seul coup, on commence à refaire bouger des choses et c’est souvent le bazar.

Et puis certains choix sont hasardeux et  ne tiennent pas compte de l’observation.

Il  nous manque donc un élément entre l’œil et la main : la parole.

C’est ce qu’on est venu mettre en exergue dans cet exercice (référence à un exercice de dessin d’après description réalisé en live)

La parole c’est un peu ce chaînon manquant.

La clé pour coordonner l'oeil et la main en dessin

Le dessinateur fonctionne en espérant que la main va obéir à l’œil, comme si cela se faisait naturellement, comme si voir et retranscrire étaient immédiats.

Mais en réalité, la main ne réagit pas toujours directement à l’information, parce qu’elle est en train de fabriquer quelque chose.

L’œil voit dans l’immédiateté, alors que la main a besoin de temps pour construire.

Et cette information visuelle, captée par l’œil, n’est pas toujours une information exploitable directement pour l’action.

Parce que la main a besoin d’intentions claires pour agir !

Si on veut qu’elle exécute ce qu’on lui demande, on a tout intérêt à lui formuler des consignes précises.

Quelles sont ces intentions claires ?

Donner des informations de qualité à la main qui dessine

Il s’agit de nommer précisément ce que l’on voit, de l’énoncer clairement pour en percevoir la vraie nature.

Parfois on croit avoir suffisamment nommé les choses, par exemple :   » un oiseau » mais on revient en fin de dessin réaliser qu’on avait oublié de penser son inclinaison.

Cela signifie qu’il y a des informations essentielles qui n’ont pas été données suffisamment tôt ou qui ont été données dans le désordre.

Donner des informations ordonnées à la main qui dessine

On peut quadriller mentalement son sujet dans la page. Penser en terme de tiers, de moitié. A gauche, à droite.
IL s’agit de structurer l’espace.

Donner des informations circonstanciées à la main qui dessine

Il s’agit d’apporter des éléments permettant de visualiser et de comprendre exactement la situation.

Par exemple :  » Il s’agit d’un paysage dans lequel je vois un gros oiseau au premier plan. Derrière lui une prairie vallonée  » 

C’est pour cela que l’étape de description initiale est essentielle : elle permet d’extraire ce qui se raconte dans l’image, pour ensuite être nourri de ces informations et affiner son observation.

Et ces informations-là ne sont pas purement visuelles : elles sont captées avec l’œil, mais elles sont formulées par le langage.

On peut donc dire que l’art de la description est la première étape du dessin.

Si on ne décrit pas ce qu’on voit, on ne fournit pas à la main les informations nécessaires pour passer à l’action.

Observation - Description - Action : le protocole du dessinateur d'observation

 Le processus se déroulerait ainsi :

  1. L’observation et la prise d’information
  2. La description, en posant des mots sur ce que l’on voit
  3. L’action où l’on trace ce qui a été observé

Même nous, souvent, avec Charlotte, nous faisons un raccourci en vous disant « Observez avant de dessiner ».

Mais en réalité, cette étape intermédiaire de description est cruciale.

Finalement, dessiner, c’est comme parler à quelqu’un d’autre, comme l’a fait Sandrine dans l’exercice.

Elle a porté son attention sur la transmission à quelqu’un d’autre.

Et bien en fait, quand vous dessinez seul, c’est exactement ce que vous devriez faire.

Se parler pour dessiner

Lorsque l’on est seul, d’autres enjeux prennent le dessus : on se projette vers le résultat, on veut réussir son dessin ou le terminer rapidement.
Et donc on se précipite.

On s’attache à des détails séduisants mais secondaires. 
Puis on se focalise sur l’exécution, alors que d’autres éléments comme la structure et la hiérarchie sont tout aussi importants.

Seul avec soi-même, on pense comprendre ses intentions, mais en réalité, trop de choses sont implicites.

Et voilà qu’on fait des raccourcis, qu’on désorganise l’ordre des informations, et qu’on s’engouffre dans des impasses sans avoir réglé tous les problèmes ! 

Donc, quand on dessine, il faudrait se parler exactement comme si on racontait une histoire à quelqu’un d’autre.

Comment se raconter une bonne histoire à dessiner

Mais comment donc bien raconter une histoire ? 

  1. Ne pas ennuyer l’auditeur : on cherche à l’intéresser. 
  2. Faciliter la compréhension en présentant les choses dans un ordre logique.
  3. Lui permettre de se projeter, comme lorsqu’on raconte une histoire et que l’auditeur anticipe ce qui va se passer ensuite.


ce qui rend une histoire captivante : cette capacité à imaginer la suite et parfois être surpris.

Je reprendrai cette phrase d’Alberti dans son Traité de peinture :

Alberti de pictura

Ici, Alberti ne parle pas d’un événement narratif, mais de la façon dont le peintre se raconte l’histoire de son image et construit son espace.

Construire, c’est raconter une histoire.

Dessiner c'est raconter une histoire à sa main

 C’est décrire une action, mais une action destinée à la main.

Cela repose sur trois étapes essentielles :

1 Contextualiser

Qu’est-ce que j’ai devant les yeux ? De quoi ça parle ? Qu’est-ce qui est frappant, incontournable ? Qu’est ce qui doit retenir l’intérêt ? Qu’est ce qui est donc saillant, inévitable ?

 
C’est une étape qui est vraiment importante parce que c’est ça qui vous donne aussi cette fameuse vision d’ensemble dès le départ, sur laquelle vous allez pouvoir vous vous appuyer.
Donc ça, ça offre des perspectives

2 Ordonner

 Observer ce qui structure l’image, organiser les éléments dans l’espace, définir leur taille et leur place.
qu’est ce qui va structurer le tableau ?
 
Quelle est la place de chaque chose et quelle est la taille de chaque chose ?  On voit bien qu’on est ici dans le placement et le dimensionnement.

Cela va servir à faciliter la compréhension. Si les choses sont bien ordonnées, si elles sont bien rangées, on s’y retrouve ! 
C’est aussi simple que ça.

3 Qualifier

Décrire avec précision pour capter l’essence du sujet.

Cela permet d’avoir une vision d’ensemble et de s’appuyer dessus pour construire un dessin cohérent.

C’est à dire quelles sont les formes du sujet ? Comment puis-je les décrire de manière un peu plus fine ?
 

Par exemple ces arbres : 
Est ce que ce sont des formes rondes ? Est ce que ce sont des formes découpées ? Est ce que « découpé » est suffisant ? Est ce que « déchiré » n est pas mieux ?

Là, il y a tout un vocabulaire qui se qui peut se mettre en place.
Quel impact ça a ?

Si je dessine ça comme ça, ça va être intéressant parce que …
 
Dans cette étape là de l’ histoire, c’est intéressant de trouver des analogies et des correspondances, parce que cela peut justement faire image.

Dessiner sa petite histoire

Lorsque c’est une tierce personne qui décrit un tableau à quelqu’un qui est censé le dessiner,  l’image qu’il va utiliser ne va pas forcément frapper,  rencontrer la compréhension immédiate de l’autre.
Car nous avons des perceptions différentes et visualisons de manière très personnelle. 
 
Mais pour soir, ce sont des éléments précieux  dont on peut se servir.
 
Tout ce qui consiste à qualifier plus précisément ce qu’on observe,  va favoriser l’intérêt.
=> le notre pour dessiner
=> celui du futur spectateur du dessin
 
 » Ce qui est raconté est devenu palpable »
 

Tâchez quand vous dessinez, d’essayer de faire ce travail de verbalisation et peut être même de le faire à voix haute de temps en temps. 

Donnez à votre main des mots d’ordre pour agir, donnez lui des informations qui vont lui donner envie d’agir et lui permettre d’ agir avec de plus en plus de justesse.

 
« Si on ne fait pas un effort sur son vocabulaire, on  pense que ça va de soi. Et si on pense que ça va de soi, ça va tout seul. 
Et si ça va tout seul, ça se fait  sans vous.  » 

Du regard analytique au regard expressif

Lorsqu’on se concentre sur la construction, on est beaucoup dans les histoires de placement de formes, de dimensionnement et de proportions.
C’est petit, c’est grand, c’est vertical, c’est penché : le vocabulaire est très géométrique.

Mais il est possible d’être davantage  métaphorique et sensible.
C’est une compétence  que vous pouvez exercer au quotidien quand vous vous promenez.
Vous êtes face à un arbre : 
Est-il griffu ? est-il  moutonneux?
une barbe à papa ou bien des fils de fer ? 

Ce langage viendra considérablement enrichir l’expressivité de vos dessins
Au delà de la justesse de la construction, vous traduirez de l’émotion, une atmosphère.

arbres dessin blanche neige
les arbres griffus et menaçants de Blanche Neige
les arbres doux et moutonneux de Grant Wood
Pédagogie d'un autre atelier
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