Se comparer aux autres dessinateurs peut produire du découragement
Imaginez un jardin, votre jardin.
Vous le cultivez patiemment et vous vous y sentez bien. Vous aimez vous y promener et regarder le paysage évoluer au gré des saisons.
Vous aimez votre jardin. Cependant, dès que vous en voyez un autre, le doute s’installe.
Pourquoi vos roses ne sont pas aussi belles, pourquoi vos parterres ne sont pas aussi chatoyants?
Vous n’aimez plus votre jardin et pensez à tout recommencer, sans savoir comment atteindre la perfection que vous avez vue ailleurs.
Ainsi, avant même de vous y mettre, vous êtes découragé.
Comparer votre jardin à celui des autres ce n’est pas jardiner. Au contraire, c’est le meilleur moyen de perdre l’envie d’y aller.
La comparaison, dans le dessin, fonctionne de la même manière.
Se comparer aux grands maîtres ou à vos amis dessinateurs peut rapidement saper votre motivation et votre créativité.
Aujourd’hui, je voudrais vous parler des risques de l’évaluation sommaire et étudier les pistes d’une approche qui prend soin de votre progression.
Les dangers de la comparaison
Souvenez-vous de cette fois où vous avez été tellement impressionné par un dessin que ça vous a coupé le souffle et les jambes.
Vous vous êtes peut-être dit : « Je n’arriverai jamais à ce niveau. »
Se mesurer à un résultat que vous pensez inatteignable vous décourage mais souvenez-vous que, même les plus grands artistes, ont des corbeilles à papier débordantes.
Comme on ne montre que le meilleur, on crée l’illusion que seule l’excellence mérite d’exister, sans voir les années de travail qui ont permis à l’artiste d’atteindre ce niveau.
En effet, dessiner, c’est 1% de talent et 90% d’expérience.
Alors pourquoi se mesurer à des artistes dont vous n’avez pas l’expérience?
C’est comme si vous compariez une jeune pousse de chêne à un arbre centenaire. Chaque artiste est à un stade différent de son parcours, et il n’existe pas de raccourci : il faut avancer un pas après l’autre.
Et c’est aussi vrai lorsque vous vous mesurez à vos pairs. Sur la foi d’une seule image, vous les portez au pinacle, tandis que vous vous persuadez que votre place est à la cave.
À force de vous comparer, vous avez le sentiment que tout le monde fait mieux que vous et vous finissez par perdre de vue l’essentiel: Votre propre progression.
Pourquoi se comparer ?
Si on considère que la comparaison est néfaste, il suffirait de mettre des oeillères pour reprendre sa marche en avant paisible.
Mais c’est impossible, car nous en avons besoin depuis la nuit des temps parce qu’elle répond à des besoins essentiels.
Trouver sa place
L’un des principaux moteurs de la comparaison est notre besoin de sécurité et d’appartenance, car faire partie d’un groupe est, depuis l’origine, crucial pour notre survie.
La comparaison nous permet de nous ajuster aux normes sociales et de nous assurer que nous sommes bien intégrés dans notre communauté.
En tant qu’artistes, nous ressentons ce même besoin d’appartenance. Nous regardons le travail des autres pour nous situer, pour vérifier que nous sommes sur la bonne voie, et pour trouver des points de référence.
Il n’y a rien de plus insécurisant que de se sentir exclu du club.
Être validé
La reconnaissance et l’estime de soi sont des besoins fondamentaux. La comparaison peut être un moyen de se mesurer aux autres pour obtenir une validation externe.
Nous cherchons à être reconnus pour notre talent, notre créativité et notre travail acharné.
Les réseaux sociaux exacerbent ce besoin en nous exposant constamment aux succès des autres.
On ne dessine pas seulement pour soi. On a besoin de recevoir les retours qui confirment la manière dont on se perçoit soi-même.
Et pour ça, nous sommes prêts à bosser dur.
Dépasser ses limites
Nous avons tous un désir inné de compétence et de maîtrise. La comparaison peut être motivée par une envie de s’améliorer et de dépasser ses propres limites.
C’est en observant les œuvres des autres que nous pouvons identifier des techniques, des styles et des approches que nous voulons adopter ou surpasser.
Ce besoin peut devenir destructeur si on oublie de valoriser sa propre progression en se fixant des standards irréalistes.
Il est donc important de se comparer à des pairs de son niveau afin de bénéficier de l’émulation qui en découle.
C’est la meilleure situation possible, car chacun peut en tirer parti.
Picasso et Matisse : une rivalité créative
Pablo Picasso et Henri Matisse étaient des figures dominantes de l’art moderne, chacun avec un style et une approche distincts.
La comparaison constante et la rivalité entretenue par le public et les critiques ont souvent créé des tensions entre eux.
Mais ces deux artistes avaient un respect mutuel et une admiration pour le travail de l’autre.
Ainsi, à la fin de sa vie, Picasso faisait cette confession:
» Il faudrait pouvoir mettre côte à côte tout ce que Matisse et moi avons fait en ce temps-là. Jamais personne n’a si bien regardé la peinture de Matisse que moi. Et lui, la mienne… «
Il y a des situations où la comparaison fonctionne comme un compagnonnage. En observant le travail de quelqu’un d’autre, vous comprenez mieux le vôtre.
Alors, cette réciprocité produit une forme d’émulation dont chacun profite.
Comparez-vous ( mais pas n'importe comment ! )
- Ne vous comparez pas à une image : comparez-vous d’abord à des artistes dont vous pouvez évaluer le parcours. Côtoyez des personnes avec lesquelles vous pouvez entretenir une relation d’égalité qui permettra à chacun de dépasser ses limites et de progresser.
- Tenez un journal de références: Chaque fois que vous rencontrez une oeuvre qui vous impressionne, notez-là dans un carnet et décrivez avec vos mots ce qui vous a inspiré et quelles sont les leçons que vous en tirez et que vous aimeriez appliquer. C’est en analysant ce qui provoque votre intérêt que vous trouverez les moyens de vous en approcher.
- Fixez-vous des Objectifs Personnels : Fixez-vous des objectifs qui sont basés sur votre propre progrès et soyez attentif à ce vers quoi vous tendez. Ainsi, ne vous laissez pas parasiter par des injonctions extérieurs et ne soyez pas dupé par des images tape-à-l’oeil.
Se comparer aux autres est une habitude qui peut étouffer votre créativité. À moins d’engager un dialogue avec vos pairs.
C’est la manière dont fonctionnent les ateliers depuis qu’ils existent.
Parce qu’ils favorisent les échanges, ils permettent une transmission des savoirs et un brassage des idées qui renouvelle sans cesse la pratique.
C’est ce contexte favorable à l’émulation que nous mettons à votre disposition sur notre plateforme.
Car ici, chacun partage un travail en construction.
On y parle de ses interrogations comme de ses trouvailles et c’est bien plus utile que de scroller sur un écran, à la recherche d’inspiration.
Vous êtes de plus en plus nombreux à rejoindre l’atelier pour être là où se fabrique le dessin.
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