Cette semaine le COVID a frappé.
Autant vous dire que, dans mon état, je n’ai pas écrit une thèse à propos de l’influence du romantisme sur l’espace mental et perceptif de l’individu 😅
Non. Groggy devant Netflix, je me suis assoupi mollement.
Mais soudain, une séquence m’est revenue en boomerang, me suggérant le sujet de cette newsletter.
La fièvre, sans doute… 🤒
C’était une scène d’exposition qui présente un homme à travers des actions quotidiennes dont la répétition révèle l’embarras d’une vie ennuyeuse et néanmoins pleine de tracas.
Par exemple, chaque journée du mardi débute de la même manière:
au petit matin, sous un crachin maussade, le protagoniste court, pieds nus dans la rue en tirant une poubelle pleine, à la poursuite des éboueurs dont le camion s’éloigne.
À mesure que les semaines passent, la poubelle gonfle inexorablement.
Le message est clair:
Pour que ça change, le héros va devoir vider son sac…
Et c’est peut-être ce que vous devriez faire aussi, pour vous épargner une pratique du dessin pleine d’embarras à répétition.
Allégez-vous !
Vous allez comprendre.
Apprendre à dessiner, nécessite d’acquérir de nombreuses compétences.
Mais ce qu’on ne dit jamais c’est que l’apprentissage génère, à notre insu, une quantité de déchet qui est proportionnelle au savoir que l’on accumule.
Donc, tout comme la vie domestique, la vie artistique exige une bonne gestion des déchets.
Y mettre de l’ordre, c’est aussi mettre de l’ordre dans sa tête.
1| Soulager la bande passante 🧠
Apprendre à faire le vide n’est pas un choix, c’est une nécessité.
Par exemple, dans les questions que nous posent nos élèves, on trouve en moyenne 25% d’encombrants qui occupent une part importante de l’espace mental et nuisent à la clarté d’esprit.
- J’ai bien compris que… pourtant je ne peux m’empêcher de…
- Je cherche à faire ceci mais en même temps je voudrais faire cela…
- Je me trouve dans une situation très exceptionnelle qui remet en question tous les acquis…
C’est humain, mais on ne peut pas rester comme ça.
Alors on cherche l’élément manquant qui nous sortirait de l’impasse et on est convaincu, qu’il faut en rajouter.
Mais ça ne fait qu’accentuer la confusion, car la surcharge d’informations génère un doute destructeur qui parasite l‘analyse et court-circuite la prise de décision.
Dites-vous que vos capacités sont limitées.
Entendez bien, ce n’est pas une insulte 😅 c’est une réalité qui vaut pour tous et, si on accepte de comparer le fonctionnement du cerveau humain à celui d’un ordinateur, on comprend mieux ses limites fonctionnelles.
En effet, s’il possède une capacité de stockage phénoménale, il ne peut allouer qu’une partie de sa puissance à l’exécution des tâches que nous lui commandons.
C’est la différence entre la mémoire de stockage et la mémoire de calcul.
Or, dessiner exige une importante puissance de calcul en raison de la foule de paramètres qu’il faut gérer simultanément.
Donc, comme pour un ordinateur, plus vous multipliez les tâches d’arrière-plan qui ne sont pas directement requises, plus la tâche est pénible et son exécution aléatoire.
Vous n’avez donc pas le choix, vous devez faire de la place.
2| Vider la corbeille 🗑
Comme pour le héros du film, l’objectif c’est de s’engager à sortir les poubelles régulièrement pour ne plus courir après les éboueurs, en pyjama sous la pluie 😅
Le mieux c’est donc de vider sa corbeille en même temps que l’on apprend de nouvelles choses car, à mesure que vous progressez, certaines idées ou certains usages deviennent obsolètes.
- ce sont des idées préconçues que l’apprentissage a ébranlé et qui ne demandent qu’à tomber
- Ce sont des façons de faire que vous pouvez abandonner sans regret
- Ce sont des attentes dans lesquelles vous pouvez cesser de vous projeter
- Ce sont les attributs appartenant au dessinateur que vous étiez avant et qui vous empêchent d’être celui que vous pouvez être aujourd’hui.
C’est important de faire le tri au fur et à mesure, sinon les nouveaux acquis s’empilent sur d’anciennes habitudes devenues obsolètes.
Votre pratique est alors structurée comme un mille feuille dont chaque bouchée mélange le goût de l’inconnu avec celui, trop connu, de vos anciennes habitudes.
Ne les laissez pas vous rappeler qui vous n’êtes plus !
Mais faire sa mue n’est pas si facile car, après tout, on y tient à sa vieille peau…
3| Le Syndrome de Diogène ❌
Quand on apprend, on part toujours d’un manque.
C’est insécurisant… 😱
Comme nous avons peur de perdre pied, nous tenons fermement nos problèmes, nos habitudes et nos croyances. Nous nous y agrippons comme à une bouée, parce qu’ils nous semblent familiers.
Mais nous ne faisons que dériver et entasser n’aide pas.
Mais notre aversion à la perte est telle que prenons souvent de mauvaises décisions, au point de manquer les opportunités qui se présentent, au motif qu’elles apparaissent plus risquées.
Or, apprendre à dessiner c’est apprendre à se risquer hors de ses bases pour assumer le risque de se modifier. Il faut donc accepter de perdre quelque chose en route pour un gain hypothétique.
Ok, mais qu’est-ce qu’on gagne ?
Pour le découvrir, je vous conseille de visualiser ensemble les gains et les pertes car ce sont les ballasts qui permettent de maintenir votre embarcation à l’équilibre.
4| La décision comme priorité
Vous êtes le gardien de votre apprentissage. Vous avez la responsabilité de filtrer les entrées et les sorties et c’est important d‘en tenir la comptabilité.
Dressez un tableau dans lequel vous observez les mouvements, exactement comme sur un compte en banque.
La fréquence de contrôle dépend de la manière dont vous menez votre formation et du temps que vous y consacrez, mais disons qu’un relevé mensuel est suffisant.
Votre tableau se divise en 3 colonnes: | les entrants | les sortants | le purgatoire |
- Dans la colonne entrants, notez tout ce que vous avez découvert, avalisé et compris et que vous décidez d’intégrer à votre pratique de manière systématique.
- Dans la colonne sortants, notez toutes les pratiques que vous définissez comme obsolètes, les idées dont vous décidez de vous débarrasser, les projets que vous souhaitez abandonner.
- Dans la colonne purgatoire mettez tout ce qui n’est pas clair: ce que vous supposez valable mais que vous n’avez pas bien intégré, ce que vous n’arrivez pas à supprimer car vous n’êtes pas 100% convaincu.
Prenez vos décisions rapidement, engagez-vous à supprimer ou à intégrer ce qui doit l’être.
Mais que faire du purgatoire ?
Dites-vous qu’il est le reflet des choix que vous n’arrivez pas à faire. C’est donc l’opportunité de régler les conflits qui vous encombrent, à condition de vous y atteler.
L’analyse déclenche toujours de bonnes pistes travail 😊
Tenir cette comptabilité vous permet de vider progressivement votre corbeille et de limiter les trop nombreuses alternatives. Ainsi, vous gagnez de l’espace pour vous concentrer sur l’essentiel.
Mais vous n’êtes peut-être pas convaincu.
Vous vous dites que c’est trop simple et en même temps, vous estimez que c’est trop contraignant.
5| Moins de choix = plus d’action 🚀
Ne le voyez pas comme une discipline, mais plutôt comme une habitude.
Compter et choisir sont des opérations que vous effectuez 1000 fois par jour, sans vous en apercevoir.
Ce qui compte n’est pas de bien remplir son tableau une fois mais de le faire mal, et souvent.
Car la répétition est une gymnastique qui éloigne la crainte d‘une mauvaise décision.
Vous découvrirez bientôt que vos choix ne sont que des pertes temporaires.
Car vous remettez les pendules à l’heure à chaque bilan.
Tous les artistes procèdent un jour ou l’autre à des choix drastiques.
On ne peut pas emprunter tous les chemins en même temps et il faut bien choisir d’être quelque part.
Ainsi, on peut dire que le style d’un artiste se dessine en fonction des portes qu’il a su refermer.
Mais il est important de comprendre que ces décisions ne sont pas limitantes.
Au contraire, elles sont la condition d’une exploration riche et étendue.
Ainsi, l’auteur de bande dessinée David Prudhomme, qui est un dessinateur hors pair, se fixe des limites très strictes. Pour chaque projet qu’il entreprend, il pousse son dessin dans une direction spécifique, à l’exclusion de toute autre.
Mais ça ne le dérange pas de restreindre son champ de recherche, car il le fait de manière temporaire, ce qui lui permet de s’y plonger intensément.
Le résultat, c’est qu’au fil des ans, il s’est constitué une palette d’expression lui permettant de faire à peu près tout, lui inspirant cette réflexion:
“J’aime bien l’idée de vivre à toutes les époques du dessin et sur tous les rivages. »
Je vous conseille la lecture passionnante de l’ouvrage qui lui est consacré et qui parle très bien de la manière dont se forme un dessinateur.
En conclusion, apprendre c’est remplir et vider en même temps.
Alors, lorsque vous sentez la confusion vous gagner, ne vous ruez pas sur la boite de rustines pour colmater les brèches.
Essayez de voir ce que vous pouvez retrancher pour ne conserver que ce qui sert votre progression.
Observez ce qui est bon pour vous et faites des choix pour aujourd’hui.
Résistez à l’impatience. Soyez certain qu’aujourd’hui repassera, comme autant d’occasions de faire le point.
Vous aurez une meilleure perception de votre progression et de vos besoins.
Vous apprendrez à reconnaitre les moments charnières de votre apprentissage pour pouvoir l‘orienter avec justesse.
Vous aurez la clarté d’esprit nécessaire pour favoriser l’émergence d’initiatives nouvelles, guidé par un appétit de découverte.
Car jour après jour, vous vous transformez pour devenir un nouveau dessinateur.
Et le chemin n’est jamais fini.
Mais si après cela vous constatez que vous avez du mal à remplir la case “entrants”, ne vous inquiétez pas.
Vous avez jusqu’à dimanche pour rejoindre l’Atelier au tarif exceptionnel de lancement. Vous intégrerez progressivement à votre apprentissage tous les secrets du dessin, puis vous pourrez en oublier une partie…
Ce sera le signe qu’il vous appartiennent pour de bon 😉
C’est tout pour cette semaine,
j’espère que cette lettre vous sera aussi utile à lire qu’elle m’aura été utile à écrire…
À l’occasion dites-moi si vous vous saisissez de cette proposition et comment vous l’adaptez à votre situation.
À la semaine prochaine 👋
Vous venez de lire la 30 ème édition de LA BOBINE, la newsletter d’Un Autre Atelier écrite par Laurent qui vous accompagne chaque vendredi dans votre pratique du dessin.